Le Syndrome de l’imposteur

Céline (nom d’emprunt), 45 ans, cadre dans une multinationale, me consulte car elle a l’impression d’avoir des problèmes d’attention. Elle suspecte un TDAH car elle se sent aussi très agitée mentalement et hyperactive: elle n’arrive pas « à ne rien faire » ou à profiter d’un bon moment. Elle procrastine aussi parfois dans ses projets professionnels.

Lors du premier entretien, Céline explique qu’elle a beaucoup de mal à se concentrer à son travail, qu’elle ne sent pas efficace et qu’elle doit toujours vérifier son travail pour éviter les erreurs. Quand je lui demande si elle reçoit des remarques ou des évaluations négatives de la part de ses collègues ou de ses supérieurs, elle explique qu’ils ne remarquent rien et sont, au contraire, très satisfaits d’elle. Cela la met encore plus mal à l’aise et elle a l’impression qu’on surestime ses compétences ou se trompe sur son compte. Je remarque dans le discours de Céline beaucoup de craintes par rapport au fait de commettre une erreur dans ses tâches professionnelles ou d ‘échouer. Quand je lui demande si elle commet frequemment des erreurs d’innattention, Céline explique que c’est rare parce qu’elle est perfectionniste. Enfin, quand je lui demande comment elle se sent généralement après un succès et sur ce qu’elle se dit intérieurement, elle répond qu’elle est rarement satisfaite de son travail et qu’elle se dit souvent qu’elle aurait pu mieux faire. Dans sa vie privée, Céline n’a pas beaucoup de loisirs en dehors de sa famille et de son ménage. Elle n’arrive pas à se détendre. Quand elle procrastine une tâche importante, c’est pour faire des tâches professionnelles secondaires, mais jamais pour faire une activité plaisante. Céline explique qu’elle a eu des parents très exigeants. Il fallait ramener d’excellentes notes. Elle était dans une école également exigeante où les élèves étaient fréquemment comparés les uns aux autres selon leurs notes. Elle ressentait beaucoup de pression et de stress. Elle a réussi brillament à l’école et plus tard à l’université mais, selon elle, au prix de beaucoup d’efforts. Elle ne pense pas avoir des facilités sur le plan intellectuel car, d’après elle, si elle en avait, elle ne devrait pas faire autant d’efforts pour réussir. Elle pense aussi avoir eu beaucoup de chance dans la vie car elle vient d’un milieu socio-économique favorisé.

Comme je m’y attendais les quelques épreuves attentionnelles que j’ai fait passer à Céline sont très bien réussies. Malgré ses belles performances, Céline montrait cependant beaucoup d’anxiété et de doute lors de l’évaluation. Son histoire n’est pas non plus compatible avec un TDAH. Mais alors, qu’est-ce qui peut expliquer les difficultés d’attention de Céline?

D’une part, Céline manifeste beaucoup de préoccupations anxieuses, ce qui peut affecter ses capacités attentionnelles et sa mémoire de travail. En outre, elle est très souvent stressée et ne semble pas réussir à se détendre, ce qui peut conduire à un épuisement qui va aussi affecter ses ressources attentionnelles. D’autre part, son discours et son histoire démontrent un décalage très important entre la manière dont elle se perçoit (peu efficace, peu compétente) et la manière dont elle est perçue en réalité par son entourage (très organisée, efficace et intelligente), ce qui fait penser au syndrome de l’imposteur.

Le syndrome de l’imposteur (SI) tel que défini par Pauline Rose Clance, désigne un doute persistant quant à ses compétences et une peur irrationnelle d’être démasqué(e) comme un « fraudeur » malgré des succès objectifs. Les personnes qui en souffrent attribuent souvent leurs réussites à des facteurs externes (chance, circonstances, aide d’autrui) plutôt qu’à leurs compétences réelles. Clance a d’abord observé ce phénomène chez des femmes hautement performantes, mais des recherches ultérieures ont montré qu’il concerne aussi bien les hommes que les femmes et peut toucher divers domaines professionnels et académiques.

Les caractéristiques principales du SI selon Clance :

  • Sentiment de fraude malgré des preuves de réussite, impression de tromper les autres
  • Peur d’être exposé(e) comme incompétent(e)
  • Difficulté à intérioriser, accepter ses succès 
  • Attribution des réussites à la chance ou à l’aide extérieure.
  • Auto-exigence excessive, perfectionnisme
  • peur de l’échec et des erreurs

Selon une étude de Bravata et al. (2020), le syndrome de l’imposteur est significativement corrélé à des niveaux élevés d’anxiété. Il est notamment fortement associé à l’anxiété de performance et à l’anxiété généralisée. Les personnes concernées ressentent en effet une pression constante pour maintenir un niveau de réussite élevé par peur d’être « démasquées ». Cette peur peut engendrer :

  • Une rumination anxieuse : anticipation excessive de l’échec et scénarios catastrophes.
  • Un perfectionnisme rigide : procrastination ou surinvestissement pour éviter toute erreur.
  • Des symptômes physiques d’anxiété (palpitations, tensions musculaires, troubles du sommeil).

Lorsque le syndrome de l’imposteur est chronique, il peut évoluer vers une baisse de l’estime de soi, une dévalorisation excessive, un sentiment d’incompétence, épuisement émotionnel qui sont des facteurs de risque majeurs pour la dépression.

le syndrome de l’imposteur et le burnout sont aussi étroitement liés, car les mécanismes psychologiques du premier peuvent favoriser l’épuisement professionnel. Ainsi, un niveau d’auto-exigence excessive conduit à travailler plus que nécessaire pour « prouver sa valeur » ou fournir un travail « parfait ». De même, la difficulté à reconnaître ses réussites mène à un sentiment de ne jamais en faire assez.

Cet hyper-investissement n’est généralement pas compensé par des périodes de repos ou de détente car il y a généralement une sensation de culpabilité lors des pauses. Il n’est donc pas étonnant que les capacités attentionnelles en prennent un coup, elles qui ne sont pas illimitées. En outre, l’anxiété chronique conduit à un stress persistant délétère qui fait le lit du burnout.

Le surinvestissement alterne aussi avec des phases de procrastination : réaliser un travail « parfait » (idéal de la personne) demande énormément d’énergie, de travail et est particulièrement anxiogène. Comme la personne craint d’échouer ou d’être critiquée, elle évite de s’y mettre, se lance frénétiquement dans des tâches plus secondaires (trop stressée pour s’amuser). Quand elle finira par s’y mettre en dernière minute, elle pourra protéger son estime de soi fragile en se disant « Si j’échoue, c’est parce que je n’ai pas assez travaillé, pas parce que je suis incompétente. » Cette stratégie inconsciente de protection peut aussi constituer de l’auto-sabotage : la personne se met elle-même des bâtons dans les roues pour éviter de confronter une peur profonde : l’échec, le rejet, ou la confirmation qu’elle « n’est pas à la hauteur ». Parfois, ça passe et le travail en dernière minute est tout de même bien fait, mais parfois, il est abandonné (« Je préfère ne pas essayer plutôt que de faire quelque chose de moyen. »).

Céline a été rassurée sur ses capacités attentionnelles, mais il lui a donc été vivement conseillé de réaliser un suivi thérapeutique impliquant notamment :

  • Une restructuration cognitive : identifier et déconstruire les pensées automatiques négatives (pensées/croyances dysfonctionnelles), apprendre à attribuer ses succès à ses propres mérites quand c’est justifié, etc.
  • Un travail sur le discours intérieur et l’auto-compassion : accepter ses réussites sans les minimiser, apprendre à se parler de manière encourageante et constructive, etc.
  • L’apprentissage de techniques de gestion du stress : méditation, respiration, TCC, activité physique etc.
  • La psychoéducation sur le phénomène pour prendre du recul (lecture d’ouvrages ou écoute de podcasts sur ce thème)
  • L’apprentissage de stratégies et conseils neuropsychologiques pour mieux comprendre et prendre soin de ses ressources cognitives et émotionnelles.

Sans cela, elle risque effectivement de s’épuiser et de voir un jour ses capacités cognitives réellement affaiblies. En effet, le stress chronique à long terme est délétère pour les capacités cognitives comme la mémoire et l’attention. Le stress prolongé entraîne une libération excessive de cortisol, qui peut littéralement rétrécir l’hippocampe, une structure clé pour la mémoire. Il perturbe aussi les processus de régulation du cortex préfrontal, essentiel pour l’attention soutenue, le contrôle des impulsions et la flexibilité cognitive. Après un burnout, il arrive aussi que l’amygdale, centre de la peur et des émotions, devienne hyperactive, entraînant un état de vigilance permanent. Ce qui peut expliquer pourquoi beaucoup de patients post-burnout se décrivent ainsi souvent comme beaucoup plus sensibles et émotionnels qu’avant.

Catherine Demoulin

Pour aller plus loin:

Le syndrome de l’imposteur : les clés pour changer d’état d’esprit ! De Kevin Chassangre

Traiter la dépréciation de soi : le syndrome de l’imposteur. De Kevin Chassangre

Activité physique & nature contre Anxiété & Dépression

En Belgique comme en France, on consomme énormément d’anti-dépresseurs et d’anxiolytiques. Et dans la majorité des cas, ceux-ci sont prescrits par un médecin généraliste, non par un psychiatre, pour mieux gérer des épreuves difficiles sur le plan émotionnel. Parfois, les patients continuent à prendre ces médicaments à long terme, alors qu’ils avaient été prescrits que pour une courte durée.

Or, idéalement, ces médicaments ne devraient être utilisés que dans les formes sévères de dépression ou d’anxiété (donc après diagnostic émis par un spécialistes de ces troubles). Pour les formes moins sévères de dépression et d’anxiété, une psychothérapie est recommandée, afin d’explorer les causes du mal-être, d’exprimer et de partager le vécu émotionnel, d’envisager des solutions, des changements dans le mode de vie, etc. Malheureusement, on a aujourd’hui tendance à médicaliser très vite les états émotionnels liés aux événements de la vie (difficultés professionnelles, deuil, divorce…) et à vouloir soulager immédiatement les difficultés psychologiques sans accompagnement et travail psychologique.

Les émotions ont une fonction informative: elles véhiculent un message, nous indiquent si nos besoins et nos valeurs sont satisfaits. Les ignorer ou chercher à les « anesthésier » pour continuer à fonctionner « normalement » n’est pas une solution valable à long terme. Un grand nombre de pathologies psychologiques ont, en effet, leur origine dans la non-réalisation de nos besoins (ex: besoins de reconnaissance, d’affection, de sécurité, de liberté, d’accomplissement…). Un travail sur ses émotions et ses besoins fondamentaux est donc un élément central dans la résolution des conflits intérieurs et extérieurs.

A ce travail thérapeutique, devraient s’ajouter une activité physique régulière et des sorties nature. En effet, ces activités peu coûteuses peuvent être considérées comme des stratégies importantes dans la régulation des émotions. Nous allons découvrir pourquoi.

Les effets de l’activité physique sur l’état émotionnel

L’OMS préconise aux adultes de consacrer au moins 150 à 300 minutes (2h à 5h) par semaine, à une activité d’endurance d’intensité modérée ; ou de pratiquer au moins 75 à 150 minutes d’activité d’endurance d’intensité soutenue. L’OMS ajoute qu’ils devraient pratiquer 2 fois par semaine (ou davantage) des activités de renforcement musculaire d’intensité modérée ou supérieure – qui sollicitent les principaux groupes musculaires.

On sait déjà qu’avoir un niveau d’activité physique élevé nous protège contre de nombreuses maladies (diabètes, maladies cardiaques, cancer du colon, hypertension…), améliore la qualité de notre sommeil et celle de notre vie sexuelle. Mais ses effets positifs ne se limitent pas à notre santé physique.

De plus en plus d’études montrent, en effet, que l’exercice physique peut représenter un traitement efficace contre la dépression légère à modérée, et contre l’anxiété (voir la méta-analyse récente de Aylett, Smal & Bower, 2018). Allier travail thérapeutique et programme d’activité physique serait particulièrement bénéfique.

Voici quelques effets immédiats du sport sur le cerveau :

  1. Augmentation la sensation de bien-être : l’activité physique modérée ou intense entraîne la libération d’une série d’hormones et de neurotransmetteurs, comme les endorphines, la dopamine et la sérotonine. Cela favorise après-coup une sensation de bien-être, d’apaisement. Plus on bouge, plus on a envie de bouger davantage, car le cerveau en redemande. C’est un cercle vertueux.
  2. Déconnexion : lorsqu’on est concentré sur une activité physique, le cortex préfrontal (siège notamment des ruminations…) connaît une baisse d’activité. Les ressources du cerveau sont recrutées pour la perception, la planification et l’exécution des mouvements du corps. Cela permet de se « vider l’esprit » des soucis, de mettre en pause les ruminations mentales que connaissent les personnes déprimées ou anxieuses.
  3. Réduction de l’hormone du stress : le stress chronique (que vivent les personnes anxieuses) s’accompagne d’une montée de cortisol, ce qui s’avère délétère à long terme pour le cerveau. Or, l’activité physique permet justement de réduire le niveau de cortisol et pourrait même « réparer » les dégâts provoqués par l’excès de cortisol sur certaines régions cérébrales.
  4. Augmentation de l’estime de soi et du sentiment de compétence : l’estime de soi et le sentiment de compétence sont généralement défaillants en période de mal-être. L’activité physique permet de rehausser ces sentiments. Lorsqu’on se dépasse, qu’on fait l’effort de surmonter sa tendance à l’inertie et qu’on atteint un petit objectif, on se sent généralement content de soi après-coup (pour autant qu’on ne se soit pas fixé des objectifs irréalistes).

A plus long terme, une activité physique régulière entraîne aussi d’importants bénéfices sur le cerveau et les fonctions cognitives, notamment sur l’attention, la mémoire à long terme et les fonctions exécutives. D’où l’importance de la régularité.

Alors pour notre équilibre mental… Bougeons ! Quelles que soient les activités physiques choisies (marche, jardinage, jogging, vélo, fitness, tennis, basket, boxe, yoga, natation…), l’essentiel est qu’elles soient régulières (3 à 5 fois semaine). Choisissez des activités qui vous plaisent. L’accompagnement d’un coach personnel n’est pas un luxe pour démarrer si votre « coach intérieur » est défaillant.

Passons maintenant aux bienfaits de la nature sur notre moral.

Les effets de la nature sur l’état émotionnel

Notre besoin de nature est généralement insatisfait mais peu d’entre nous en ont conscience. En effet, sur le plan de l’évolution, nous ne sommes pas adaptés à rester assis derrière un bureau 8 h par jour sous des lumières artificielles et derrière un écran. A contrario, notre corps est tout à fait adapté à marcher, à courir, à explorer l’environnement et à vivre au rythme de la nature. D’ailleurs, l’hormone du sommeil est libérée progressivement lorsque la lumière du jour baisse. Or, pour beaucoup d’entre nous, notre environnement est de plus en plus urbain, avec de moins en moins d’expérience avec la nature.

Un nombre croissant d’études démontre l’impact positif de la nature sur notre santé tant physique que mentale, et cela à tout âge de la vie (e.g., Bowler et al. 2010). Ainsi, l’exposition à la nature entraîne:

  • une diminution du stress (baisse du rythme cardiaque, de la pression artérielle et du taux de cortisol),
  • une amélioration de l’humeur,
  • une hausse de l’estime de soi
  • une hausse du sentiment de bonheur

En outre, des recherches montrent que les relations avec la nature peuvent aider à retrouver des rythmes physiologiques « normaux », souvent perturbés dans les moments de dépression et d’anxiété (insomnies, manque ou excès d’appétit…). Par exemple, elles favorisent le sommeil, grâce à l’exposition à la lumière naturelle.

Au Japon, des thérapies « bains de forêt » (shinrin-yoku) sont d’ailleurs reconnues par les autorités sanitaires et frequemment prescrites pour lutter contre le stress quotidien.

En résumé, allier « activité physique » et « bains de nature » est une stratégie simple, peu coûteuse et efficace pour améliorer ou maintenir son bien-être physique ET mental.

Enfin, rappelez-vous que « un peu est mieux que rien ». Même s’il est clair qu’il est très difficile de se bouger ou de sortir quand on se sent mal ou déprimé, dites-vous que c’est toujours le démarrage qui est le plus compliqué. Il est aussi possible de se faire accompagner par une personne de confiance ou un thérapeute.

« Si tu n’arrives pas à penser, marche ; si tu penses trop, marche ; si tu penses mal, marche encore ».

Jean GIONO

Aider son enfant à surmonter son anxiété

Comprendre l’anxiété

L’anxiété se définit comme la peur anticipée d’un danger ou d’un malheur, souvent sans menace immédiate. Elle s’accompagne de manifestations physiques et psychiques : tensions musculaires, troubles du sommeil, irritabilité, maux de ventre, difficulté à se concentrer… Dans les cas plus intenses, elle peut provoquer des crises de panique (respiration rapide, nausées, douleurs thoraciques, etc.).

À petites doses, l’anxiété est utile : elle nous aide à anticiper, à nous concentrer et à nous préparer à faire face à une situation (examen, entretien, compétition…). Elle peut nous motiver et améliorer nos performances – c’est ce qu’on observe chez les sportifs, par exemple.

Mais lorsqu’elle devient persistante, excessive et envahissante, sans danger réel, elle peut nuire au quotidien. Elle peut pousser à éviter certaines situations (prendre la parole, affronter un défi, se rendre quelque part…), freiner la réalisation de nos objectifs ou même provoquer une paralysie émotionnelle.

Trois grands types de réactions primaires

L’anxiété provient de la peur, une émotion vitale qui nous a permis de survivre en temps de danger. Face à une menace, notre organisme réagit selon l’un des trois grands mécanismes de défense :

  1. Fuir : Échapper à la menace pour protéger notre sécurité.

  2. Se figer : Rester immobile pour éviter d’attirer l’attention ou de provoquer une attaque.

  3. Combattre : Réagir avec agressivité si nécessaire, par exemple pour se défendre.

Ces trois mécanismes sont ancrés dans notre cerveau. Aujourd’hui, nous sommes moins souvent confrontés à des dangers physiques que nos ancêtres. Nos peurs sont plus fréquemment déclenchées par l’anticipation de difficultés potentielles : échouer à un examen, se ridiculiser à un discours en public, perdre un proche, avoir des problèmes financiers…

Autrement dit, ces trois réponses sont automatiques et programmées biologiquement. Elles sont toujours présentes aujourd’hui, même si les dangers modernes ne sont plus les mêmes que ceux de nos ancêtres.

Les peurs du monde moderne

Dans la société moderne, nous avons donc moins souvent à gérer des dangers physiques immédiats mais bien des scénarios de menaces potentielles que notre esprit nous soumet :

« Et si je me trompe ? »,
« Et s’il lui arrive un accident ? »,
« Et si je ne suis pas à la hauteur ? »,
« Et si j’ai l’air ridicule ? »,

Les personnes souffrant d’anxiété sont particulièrement douées pour imaginer des scénarios catastrophes. Or, même sans menace réelle, le corps réagit comme s’il y avait un danger : le rythme cardiaque s’accélère, les muscles se tendent, la respiration s’emballe… Ce sont les mêmes réactions physiologiques que face à un serpent ou un feu de forêt.
L’anxiété peut alors conduire à une réponse de fuite : éviter la situation stressante à tout prix, se distraire avec une activité qui occupe l’esprit, ou encore se plonger dans la consommation excessive (drogue, alcool). Parfois, l’enfant peut adopter une attitude figée, se sentir paralysé ou complètement résigné face à une situation.

Reconnaître l’anxiété chez son enfant est la première étape pour l’aider à surmonter ses peurs.

Comment aider son enfant à surmonter son anxiété ?

Si l’anxiété de votre enfant devient envahissante, voici quelques pistes pour l’aider à mieux la gérer et à surmonter ses peurs. Si les symptômes persistent, il peut être utile de consulter un psychologue pour un accompagnement plus approfondi.

1. Apprenez-lui à respirer

L’une des premières choses à enseigner à un enfant anxieux, c’est la respiration profonde. En cas de crise, apprendre à respirer lentement permet de calmer le corps en ralentissant le rythme cardiaque et en réduisant les tensions. Vous pouvez lui montrer un exercice simple :

  • Inspire profondément par le nez,

  • Retenir quelques secondes,

  • Expire lentement par la bouche.

Répétez l’exercice plusieurs fois jusqu’à ce que son corps se détende.

2. Encouragez la verbalisation et l’expressiond des émotions

Aider votre enfant à mettre des mots sur ses peurs est crucial. Parfois, exprimer ce qui le tracasse suffit à alléger son anxiété. Demandez-lui ce qu’il ressent, ce qu’il imagine, et encouragez-le à décrire la situation qui l’inquiète. Cette verbalisation permet de mettre en lumière ses pensées irrationnelles et de les questionner. 

Mais les enfants n’ont pas toujours les mots pour exprimer ce qu’ils ressentent. On peut les encourager à utiliser des techniques créatives pour libérer leurs émotions, comme :

  • Le dessin : Demander à l’enfant de dessiner ce qui lui fait peur ou ce qu’il ressent. Cela peut l’aider à verbaliser ce qu’il n’arrive pas à dire.

  • Le jeu de rôle : En jouant à être une autre personne ou un personnage, l’enfant peut mettre de la distance entre lui et ses angoisses (ex: que ferait Spiderman dans la même situation?)

  • L’écriture : Pour les enfants plus grands, leur donner un carnet pour exprimer leurs pensées peut être un excellent exutoire.

3. Valider les émotions sans minimiser

Il est important de ne pas minimiser les peurs d’un enfant, même si elles peuvent sembler irrationnelles pour un adulte. Les angoisses des enfants, comme la peur des monstres sous le lit ou la peur de parler en public, sont réelles pour eux. Dites-lui que vous comprennez ce qu’il ressent. Par exemple :

  • « Je comprends que ça te fasse peur. C’est normal d’avoir un peu peur dans cette situation »

  • « Tu n’es pas le seul. Beaucoup d’enfants ressentent aussi cette peur des monstres même si on a encore jamais découvert de monstres sous le lit.»

Valider les émotions crée un espace de sécurité émotionnelle et permet à l’enfant de ne pas se sentir anormal, honteux ou mal compris.

4. Relativisez les scénarios catastrophes

Une fois qu’il a exprimé ce qu’il ressent, posez des questions pour l’aider à relativiser ses scénarios catastrophe. Par exemple  :

  • Face à un enfant qui se dit qu’il va échouer à une évaluation « Tu as l’air bien préparé. Tu ne penses pas qu’il y a plus de chances que cela se passe bien ? », « Au pire, si tu échoues, que se passera-t-il ? »,
  • Dédramatiser les scénarios catastrophes « Si tu échoues à cette évaluation, ce n’est pas la fin du monde. Tu pourras apprendre de tes erreurs et retenter. »

Les enfants peuvent être plus souples dans leur jugement lorsqu’on les aide à voir les choses sous un autre angle.

5. Renforcez les pensées aidantes et les solutions

Encouragez votre enfant à remplacer ses pensées négatives par des affirmations positives. Par exemple, dans une situation où il se sent anxieux, il pourrait se répéter::

  • « J’ai déjà réussi d’autres fois, je peux y encore arriver »,

  • « Tout le monde fait des erreurs, en faire une, ce n’est pas la fin du monde »,

  • « Mieux vaut essayer des choses que ne rien faire ».

6. Encouragez chaque progrès

L’anxiété ne disparaît pas du jour au lendemain. Félicitez votre enfant à chaque étape franchie, même la plus petite. Que ce soit pour avoir pris la parole en classe, avoir affronté sa peur d’un insecte ou avoir demandé de l’aide, chaque effort mérite d’être reconnu. La confiance en soi se construit progressivement.

7. Ne pas transmettre ses propres angoisses ou de mettre de la pression inutile

Si vous êtes vous-même anxieux, évitez de transmettre vos peurs à votre enfant. Un parent anxieux peut involontairement renforcer l’anxiété chez son enfant en surprotégeant ou en réagissant de manière excessive. Si vous avez des difficultés à gérer votre propre anxiété, il peut être utile de consulter un professionnel pour apprendre à mieux la gérer. 

Les enfants apprennent par l’exemple. Si un parent est capable de montrer comment gérer ses propres peurs et anxiétés de manière saine, cela servira de modèle pour l’enfant. Par exemple, si vous faites face à une situation stressante, montrez à votre enfant comment vous utilisez des techniques de relaxation (respiration, pensée positive, prise de recul). 

Evitez aussi de mettre de la pression à la performance à un enfant qui a peur d’échouer ou qui est perfectionniste. Valoriser les efforts, les progrès plutôt que les résultats, les excellentes notes aide à diminuer l’anxiété de performance et permet à l’enfant de mieux accepter ses erreurs comme des occasions d’apprentissage. 

Si votre enfant est anxieux et ramène un 4/10, évitez de montrer votre déception ou pire, de vous fâcher. Les enfants perfectionnistes se mettent d’eux-même une pression énorme sur leurs épaules, craignant l’échec à tout prix. Cela peut mener à des pensées catastrophiques comme « Si je n’obtiens pas la meilleure note, je vais décevoir tout le monde » ou « Si je ne réussis pas avec au moins 9/10, c’est que je suis nul. »  On peut apaiser leur anxiété en leur rappelant que « Ce n’est pas grave d’échouer oud ‘avoir une moins bonne note, l’important, c’est de comprendre pourquoi et d’essayer différemment la prochaine fois. »

8. Instaurer des routines rassurantes

Les enfants, particulièrement ceux qui souffrent d’anxiété, se sentent souvent plus en sécurité lorsqu’ils savent à quoi s’attendre. Une routine structurée (heure des repas, du coucher, activités régulières) peut aider à réduire l’incertitude et apporter un sentiment de contrôle. Les rituels (comme un câlin avant de dormir, lire une histoire) peuvent être des ancrages qui aident à relâcher la pression et à créer un environnement propice à la détente.

9. Eviter l’isolement social

L’anxiété peut parfois pousser les enfants à se retirer socialement, par peur du jugement ou de l’échec. Encourager doucement l’enfant à maintenir des interactions sociales avec ses pairs peut être bénéfique. Cependant, il est important de ne pas forcer l’enfant. Offrir des situations sociales à faible pression (inviter un ami à la maison, participer à des jeux en groupe) permet à l’enfant de se sentir plus à l’aise et de renforcer son confiance sociale.

10. Encourager l’autonomie de l’enfant face à ses peurs

Il est essentiel de trouver un équilibre entre le soutien et l’autonomie. L’idée n’est pas de tout faire à la place de l’enfant, mais de lui donner les outils nécessaires pour affronter ses peurs progressivement. Par exemple, s’il a peur de l’école, ne pas l’exempter de l’y envoyer, mais l’accompagner dans la gestion de son stress : “Qu’est-ce qui te fait le plus peur à l’école ? Comment pourrais-tu gérer cela ?” Ce type de dialogue stimule son autocontrôle et sa capacité à trouver des solutions adaptées.

11. Être patient et rester positif

L’anxiété ne disparaît pas en un clin d’œil. Soyez patient avec votre enfant et restez positif. Si une situation stressante s’est bien passée, félicite-le pour sa courage. Au contraire, s’il échoue ou ne parvient pas à surmonter une peur, n’en faites pas tout une affaire. Parfois, l’échec est nécessaire pour avancer. Il est essentiel de lui montrer que chaque étape, même difficile, fait partie de son processus d’apprentissage.

12. Consulter un spécialiste en cas de besoin

Si l’anxiété de votre enfant est particulièrement intense, qu’elle affecte son quotidien ou qu’elle persiste malgré vos efforts, il peut être utile de consulter un psychologue ou un psychiatre spécialisé dans l’anxiété infantile. Ces professionnels peuvent aider à identifier les causes sous-jacentes et à mettre en place des stratégies thérapeutiques adaptées.

 

Conclusion : Aider son enfant à se libérer de l’anxiété

L’anxiété est une émotion naturelle, mais elle peut devenir handicapante si elle prend le dessus. Reconnaître les signes et adopter des stratégies adaptées pour gérer les peurs de votre enfant l’aidera à surmonter ses angoisses. Patience, écoute et soutien sont essentiels. 

Pour aller plus loin:

  • « Incroyable Moi maîtrise son anxiété » (Edition midi trente): un guide d’intervention illustré conçu pour aider les enfants à mieux comprendre les manifestations physiques, cognitives et émotionnelles de leur état mais, surtout, à devenir de véritables champions de la gestion de l’anxiété. 
  • « Guide de survie pour surmonter les peurs et les inquiétudes » (Edition midi trente): Stress, phobie des araignées, attaques de panique, craintes reliées à la vie à l’école… Certains jeunes vivent chaque jour avec des peurs, des inquiétudes et de l’anxiété.